Témoignages

Témoignage d’une bénévole

Se faire comprendre

L’apprenant qui vient chez Alpha veut se faire comprendre. Il veut lire le journal et comprendre son quotidien. Il veut trouver un travail qui le sortira de son dénuement. Il veut être autonome pour pouvoir parler sans la présence de ses enfants.

Le bénévole veut faire comprendre à son apprenant les mots, les phrases, les textes.

Je suis bénévole depuis septembre 2018 au Centre Alpha et j’ai accompagné quatre personnes à mieux se faire comprendre.

J’ai beaucoup de plaisir à préparer les cours avec la multitude de documents mises à ma disposition par le Centre Alpha. J’ai une question ou je cherche du matériel plus spécifique ? Carole m’écoutera et ira chercher dans sa caverne d’Ali Baba Le livre ou Le document qui me permettra d’aller plus loin avec mon apprenant.

Une Chilienne de niveau universitaire aimait mes dictées, améliorait son français et pouvait ainsi se projeter dans un nouveau travail.

Une Québécoise anglophone voulait mieux communiquer avec son enfant fréquentant l’école francophone. Il faut faire de la conversation, lui donner des mots, la faire écrire.

Une maman africaine voulant retourner au travail devait parfaire son vocabulaire, connaître de nouveaux mots français, conjuguer ses verbes.

Une autre maman syrienne constate l’écart entre le parler de ses enfants et sa langue maternelle. Elle a besoin de pratique, d’images, de mots, de mises en situation, d’encouragements pour connaître la réalité autour d’elle.

Dans toutes ces rencontres, je reçois leur vécu, leurs peurs, leurs appréhensions mais aussi leurs sourires, leurs vies antérieures et leurs progrès.

Nous rions souvent quand ça devient difficile. Je leur parle de ma difficulté à ne pas me souvenir des petits mots espagnols, anglais, swahilis ou arabes, qu’elles viennent tout juste de me faire connaître. Ce n’est pas facile pour elles d’assimiler le français et aussi difficile pour moi de redire avec mon accent québécois le nouveau mot entendu.

Le temps passe vite. Je suis patiente. Je suis curieuse. Ce sont des qualités indispensables pour amener mon apprenante à avancer.

À travers leur français parfois bancal, j’apprends une recette de riz, un bout de pays, une situation difficile. À chaque étudiante, je dis merci d’échanger avec moi. Je leur fais connaître mon Québec français.

Cécile Viau

Témoignage d’une apprenante

Je m’appelle Johanne.

Il y a longtemps, mes parents avaient une grosse famille de onze enfants. Ils ne savaient ni lire ni écrire alors ils ne pouvaient pas m’aider à faire mes devoirs.

À l’école, je n’étais pas à mon aise dans la classe. J’étais une élève gênée, très timide. Je trouvais ça dur. J’avais de la misère et le professeur n’avait pas le temps de m’aider. Je n’osais pas beaucoup parler parce qu’on ne me demandait pas mon opinion sur beaucoup de choses.

Je suis allée à l’école jusqu’à 13 ans. Je n’en savais pas beaucoup qu’avant et j’ai lâché l’école parce que j’avais des difficultés énormes. J’étais découragée. Je suis restée à la maison jusqu’à 15 ans.

À 15 ans, je me suis mariée et par la suite, j’ai eu 2 enfants. J’aurais aimé leur lire des histoires mais je ne pouvais pas. J’aurais aussi aimé écrire des lettres d’amour à mon mari mais je n’étais pas capable.

À 30 ans, je suis allée cogner à la porte du Centre Alpha. J’y vais deux heures par semaine. Maintenant, je me sens beaucoup mieux. Aujourd’hui, quand je ne comprends pas, je n’hésite pas à poser des questions.

Je me sens à l’aise au Centre. Je parle à tout le monde; tout le monde me parle et je ne suis plus gênée. Maintenant, je lis de petits textes, je compose des phrases et j’utilise l’ordinateur avec plus de confiance. Les livres m’attirent et ma lecture devient plus facile avec le temps.

Je suis de plus en plus indépendante. Je prends l’autobus, je me sers régulièrement du calendrier pour écrire mes rendez-vous et je fais mon propre budget ainsi que celui de mon père. Je suis plus à l’aise pour lire une recette et je m’occupe de ma maison toute seule.

Aujourd’hui, je suis plus heureuse. Je fonce dans la vie et personne ne peut m’arrêter.